Exposé au séminaire Maths Club de l'Université Paris Cité donné le 17 avril 2023. On y présente l'idée de la méthode probabiliste à travers 4 exemples.
ayant certaines propriétés spécifiques. Elle repose sur la théorie des probabilités mais permet d’établir des théorèmes déterministes. Paul Erdős (1913-1996)
méthode probabiliste se décompose en trois étapes 1. On cherche une solution du problème déterministe au hasard 2. On calcule l’espérance de la variable aléatoire X correspondant au critère considéré (ou une probabilité associée)
méthode probabiliste se décompose en trois étapes 1. On cherche une solution du problème déterministe au hasard 2. On calcule l’espérance de la variable aléatoire X correspondant au critère considéré (ou une probabilité associée) 3. On applique le lemme fondamental suivant: Lemme fondamental ▷ Soit X une variable aléatoire réelle finie d’espérance m. Alors, il existe une réalisation de X inférieure ou égale à m. ▷ Soit X une variable aléatoire réelle finie et x ∈ R tel que P(X ≤ x) > 0. Alors, il existe une réalisation de X inférieure ou égale à x.
déroule selon les modalités suivantes. • Les joueurs s’affrontent jusqu’à que chacun ait rencontré (une fois) tous les autres. • Chaque match se termine par la victoire d’un joueur (et la défaite de l’autre): pas de match nul!
déroule selon les modalités suivantes. • Les joueurs s’affrontent jusqu’à que chacun ait rencontré (une fois) tous les autres. • Chaque match se termine par la victoire d’un joueur (et la défaite de l’autre): pas de match nul! Est-il possible qu’à chaque fois que l’on considère deux joueurs, il en existe un autre ayant battu ces deux joueurs?
que la victoire dans chaque match se joue à pile ou face indépendamment des autres matches. Notons, pour toute paire {x, y} de joueurs, A{x,y} la variable aléatoire qui vaut • 1 si x et y ne sont jamais battus par un même joueur, • O sinon.
que la victoire dans chaque match se joue à pile ou face indépendamment des autres matches. Notons, pour toute paire {x, y} de joueurs, A{x,y} la variable aléatoire qui vaut • 1 si x et y ne sont jamais battus par un même joueur, • O sinon. Alors, le nombre de ”situations problématiques” pour la condition recherchée est N = ∑ {x,y} A{x,y} .
le plan complexe. Exercice Soit z1, …, zn des nombres complexes de module 1. Alors, il existe des signes ε1, …, εn ∈ {−1, 1} tels que |ε1z1 + · · · + εn zn | ≥ n 2 .
Théorème Soit E un espace préhilbertien réel, v1, …, vn ∈ E de norme 1. Alors, • il existe des signes ε1, …, εn ∈ {−1, 1} tels que ∥ε1v1 + · · · + εn vn ∥ ≥ √ n. • il existe des signes ε′ 1 , …, ε′ n ∈ {−1, 1} tels que ∥ε′ 1 v1 + · · · + ε′ n vn ∥ ≤ √ n. v3 v2 v4 v1
Théorème Soit E un espace préhilbertien réel, v1, …, vn ∈ E de norme 1. Alors, • il existe des signes ε1, …, εn ∈ {−1, 1} tels que ∥ε1v1 + · · · + εn vn ∥ ≥ √ n. • il existe des signes ε′ 1 , …, ε′ n ∈ {−1, 1} tels que ∥ε′ 1 v1 + · · · + ε′ n vn ∥ ≤ √ n. v3 v2 v4 v1 −v1 + v2 + v3 + v4
Théorème Soit E un espace préhilbertien réel, v1, …, vn ∈ E de norme 1. Alors, • il existe des signes ε1, …, εn ∈ {−1, 1} tels que ∥ε1v1 + · · · + εn vn ∥ ≥ √ n. • il existe des signes ε′ 1 , …, ε′ n ∈ {−1, 1} tels que ∥ε′ 1 v1 + · · · + ε′ n vn ∥ ≤ √ n. v3 v2 v4 v1 −v1 − v2 − v3 + v4
Xn des variables aléatoires mutuellement indépendantes, de même loi donnée par P(X1 = 1) = P(X1 = −1) = 1 2 , puis construisons la variable aléatoire U = X1v1 + · · · + Xn vn . Alors, ∥U∥2 = ⟨ n ∑ i=1 Xi vi , n ∑ j=1 Xj vj ⟩ = n ∑ i=1 n ∑ j=1 ⟨vi , vj ⟩Xi Xj .
linéarité. E ( ∥U∥2 ) = n ∑ i=1 n ∑ j=1 ⟨vi , vj ⟩E(Xi Xj ). Notons que, pour des entiers i et j distincts, on obtient E(Xi Xj ) = E(Xi )E(Xj ) = 0, donc E ( ∥U∥2 ) = n ∑ i=1 ∥vi ∥2E(X2 i ).
E(1) = 1, d’où E ( ∥U∥2 ) = n ∑ i=1 ∥vi ∥2. Comme par hypothèse les vecteurs vi sont unitaires, on obtient finalement, E ( ∥U∥2 ) = n. Avec le lemme fondamental, il existe une réalisation de U telle que ∥U∥2 ≥ n et une réalisation de U telle que ∥U∥2 ≤ n.
un ensemble de résultats mathématiques de la forme suivante. Théorème Étant donné une structure, il existe une taille minimale telle que tout objet de taille supérieure contient cette structure.
un ensemble de résultats mathématiques de la forme suivante. Théorème Étant donné une structure, il existe une taille minimale telle que tout objet de taille supérieure contient cette structure. ”Le désordre complet n’existe pas.”
a au moins six personnes dans une pièce. Parmi elles, on peut toujours trouver • soit trois qui se connaissent toutes mutuellement, • soit trois qui se croisent toutes pour la première fois.
représentée par un sommet. • Deux sommets correspondant à des personnes se connaissant sont reliés par une arête rouge. • Deux sommets correspondant à des personnes ne se connaissant pas sont reliés par une arête bleue.
représentée par un sommet. • Deux sommets correspondant à des personnes se connaissant sont reliés par une arête rouge. • Deux sommets correspondant à des personnes ne se connaissant pas sont reliés par une arête bleue. Pour établir la proposition, il suffit de prouver qu’il existe un triangle d’une seule couleur indépendamment du coloriage de ce graphe.
partant de ce sommet sont coloriées soit en bleu, soit en rouge: il en existe donc au moins 3 de la même couleur, par exemple, rouge. ▷ Si les trois sommets reliés par des arêtes rouges au sommet fixé sont reliés entre eux par des arêtes bleues, alors il y a un triangle bleu.
partant de ce sommet sont coloriées soit en bleu, soit en rouge: il en existe donc au moins 3 de la même couleur, par exemple, rouge. ▷ Si les trois sommets reliés par des arêtes rouges au sommet fixé sont reliés entre eux par des arêtes bleues, alors il y a un triangle bleu. ▷ Sinon, deux de ces sommets sont reliés par une arête rouge: ils forment un triangle rouge (avec le sommet fixé).
sommets est complet quand on trace toutes les arêtes possibles entre ces k sommets (soit ( k 2 ) = k(k−1) 2 arêtes). Graphe complet à 17 sommets et 136 arêtes
sommets est complet quand on trace toutes les arêtes possibles entre ces k sommets (soit ( k 2 ) = k(k−1) 2 arêtes). Graphe complet à 17 sommets et 136 arêtes On retrouve un triangle pour k = 3 et le carré avec diagonales pour k = 4.
couleurs. Théorème Soit p et q des entiers supérieurs à 2 fixés. Alors, il existe un entier N tel que tout coloriage du graphe complet à N sommets en deux couleurs rouge et bleu contient • soit un sous-graphe complet rouge à p sommets, • soit un sous-graphe complet bleu à q sommets. Notons R(p, q) le plus petit entier N vérifiant la conclusion de ce théorème.
de l’anéantir dans un an si les êtres humains ne parvien- nent pas à trouver le nombre de Ramsey pour cinq rouges et cinq bleus. Nous pourrions réunir les meilleurs esprits et les ordinateurs les plus rapides du monde et, en un an, nous pour- rions probablement calculer cette valeur. Si les extraterrestres demandaient le nombre de Ramsey pour six rouges et six bleus, nous n’aurions d’autre choix que de lancer une attaque préventive. Paul Erdős
Théorème R(6, 6) > 17. En d’autres termes, il existe une coloration du graphe complet à 17 sommets qui n’admet pas de sous-graphe complet monochrome à 6 sommets.
8, 7.1040 coloriages du graphe à 17 sommets, • et chacun comporte ( 17 6 ) = 12376 sous-graphes à 6 sommets (et donc 15 arêtes). La vérification exhaustive serait plutôt longue, non?
sommets tel que chaque arête est coloriée • en rouge avec probabilité 1 2 , • en bleu avec probabilité 1 2 , • indépendamment de toutes les autres. Effectuons quelques calculs sur ce graphe aléatoire.
rouges. Reformulons cet énoncé plus mathématiquement. Théorème Soit X la variable aléatoire égale au nombre d’arêtes rouges dans le graphe aléatoire. Alors, E(X) = n(n−1) 4 .
qui vaut 1 si t est rouge, 0 sinon. Alors, N3 = ∑ t t , puis par linéarité de l’espérance E(N3 ) = ∑ t E( t ) = ∑ t ((1 2 )3 1 + ( 1 − (1 2 )3 ) 0 ) = ( n 3 ) 1 8 .
sous-graphes complets à k sommets avec arêtes toutes rouges dans le graphe aléatoire. Alors, E(Nk ) = ( n k ) 2−(k 2 ). Théorème Soit N′ k la variable aléatoire égale au nombre de sous-graphes complets à k sommets avec arêtes toutes bleues dans le graphe aléatoire. Alors, E(N′ k ) = ( n k ) 2−(k 2 ).
sous-graphes complets à k sommets avec arêtes toutes de la même couleur dans le graphe aléatoire. Alors, E(N) = ( n k ) 21−(k 2 ). Il suffit de noter que N = Nk + N′ k
sous-graphes complets à k sommets avec arêtes toutes de la même couleur dans le graphe aléatoire. Alors, E(N) = ( n k ) 21−(k 2 ). Il suffit de noter que N = Nk + N′ k puis d’utiliser la linéarité de l’espérance et les deux résultats précédents E(N) = E(Nk ) + E(N′ k ) = ( n k ) 2−(k 2 ) + ( n k ) 2−(k 2 ) = ( n k ) 21−(k 2 ).
Si ( n k ) 21−(k 2 ) < 1, alors il existe une coloration du graphe complet à n sommets qui n’admet aucun sous-graphe complet monochrome à k sommets, autrement dit R(k, k) > n.
Si ( n k ) 21−(k 2 ) < 1, alors il existe une coloration du graphe complet à n sommets qui n’admet aucun sous-graphe complet monochrome à k sommets, autrement dit R(k, k) > n. Dans notre cas particulier, n = 17 et k = 6 et l’on vérifie ( n k ) 21−(k 2 ) = ( 17 6 ) 214 = 12376 16384 < 1. L’égalité R(6, 6) > 17 est ainsi établie!
une application qui associe une couleur à chaque sommet telle que deux sommets voisins ne sont jamais de la même couleur. Le nombre chromatique χ d’un graphe est le nombre minimal de couleurs d’un coloriage de ce graphe.
Théorème Soit k, l ∈ N∗. Alors, il existe un graphe G tel que • le nombre minimal χ de couleurs d’un coloriage de G vérifie χ > k • la longueur g du plus petit cycle de G vérifie g > l
Théorème Soit k, l ∈ N∗. Alors, il existe un graphe G tel que • le nombre minimal χ de couleurs d’un coloriage de G vérifie χ > k • la longueur g du plus petit cycle de G vérifie g > l Considérons un graphe aléatoire à n sommets où chaque arête existe (indépendamment des autres) avec probabilité pn = 1 n (ln n)2.
Théorème Soit k, l ∈ N∗. Alors, il existe un graphe G tel que • le nombre minimal χ de couleurs d’un coloriage de G vérifie χ > k • la longueur g du plus petit cycle de G vérifie g > l Considérons un graphe aléatoire à n sommets où chaque arête existe (indépendamment des autres) avec probabilité pn = 1 n (ln n)2. Notons N la variable aléatoire égale au nombre de cycles de longueur au plus l, α la variable aléatoire égale au nombre maximal de sommets entre lesquels il n’y a aucune arête (stable maximal).
l ∑ j=3 ( n j ) 1 2 (j − 1)!(pn )j ≤ l ∑ j=3 (npn )j ≤ l ∑ j=3 (ln n)2j = o(n). Par l’inégalité de Markov, P ( N ≥ n 2 ) ≤ 2 n E(N), donc P ( N ≥ n 2 ) → 0.
n 2 ) < 1 2 , P ( α ≥ 3n ln n ) < 1 2 . P ( N < n 2 , α < 3n ln n ) = 1 − P ( N ≥ n 2 ou α ≥ 3n ln n ) ≥ 1 − P ( N ≥ n 2 ) − P ( α ≥ 3n ln n ) > 0. D’après le lemme fondamental, il existe un graphe à n sommets avec au plus n 2 cycles de longueur au plus l et un stable maximal de taille au plus 3n ln n .
un graphe • au moins n 2 sommets • sans cycle de longueur au plus l • avec un stable maximal de taille au plus 3n ln n Comme dans un coloriage d’un graphe, chaque ensemble de sommets coloriés de la même couleur est de taille inférieure à celle du stable maximal, χ ≥ n 2 × ln n 3n = 1 6 ln n.
un graphe • au moins n 2 sommets • sans cycle de longueur au plus l donc g > l • avec un stable maximal de taille au plus 3n ln n Comme dans un coloriage d’un graphe, chaque ensemble de sommets coloriés de la même couleur est de taille inférieure à celle du stable maximal, χ ≥ n 2 × ln n 3n = 1 6 ln n. Pour n suffisamment grand, χ > k.
prouver l’existence d’objets ayant certaines propriétés spécifiques. Elle repose sur la théorie des probabilités mais permet d’établir des théorèmes déterministes. Elle est applicable à de nombreux domaines où apparaissent des aspects combinatoires. Elle remplace l’étude exhaustive de toutes les configurations par une étude ”en moyenne”.